Sœur Madeleine Boland vient d’être prolongée pour 5 ans comme abbesse des Bénédictines. C’était l’occasion de la rencontrer pour une interview qui aborde beaucoup d’aspects de la vie religieuse et ses défis dans le monde d’aujourd’hui.
Quand et comment est née votre vocation ?
Quand j’avais 16 ans, j’ai rencontré l’abbé Joseph Cassart lors d’une retraite de classe à Dalhem, alors que je faisais des études de nursing, à Chênée. C’était ma première expérience spirituelle. Je me souviens encore d’une phrase suscitée en moi : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils ». Je pensais déjà à la vie religieuse auparavant après la rencontre d’une religieuse qui m’avait ouverte à la foi, mais c’est à ce moment que j’ai ressenti un appel.
Après la retraite, l’abbé Cassart a proposé à quelques jeunes en recherche spirituelle de constitué un groupe « Nazareth » pour continuer à cheminer ensemble. Nous nous réunissions dans un local de l’abbaye des Bénédictines. J’allais à la messe à l’abbaye tous les jours, à 6h45 avec ma maman, avant d’aller aux cours. Ce sont les offices qui m’ont fait connaître la vie religieuse.
Ensuite, j’ai suivi des études d’institutrice primaire et j’ai demandé d’entrer à l’abbaye. C’est la prière qui m’a attiré. Je connaissais rien à la règle de Saint Benoît, mais je ressentais que c’était le lieu de ma vocation. C’était le 8 septembre 1976. Nous étions trois au noviciat et 60 sœurs faisaient partie de la communauté. J’ai fait ma profession perpétuelle en 1982, devant Mgr Van Zuylen et j’ai commencé à travailler à l’école des Bénédictines, au secrétariat, avant la fusion avec le Collège Saint-Servais.
Quand êtes-vous devenue abbesse ?
Au mois de décembre 2005, les vacances de Noël ont commencé et, au début de l’année, avait lieu le chapitre pour l’élection de l’abbesse. C’était le 4 janvier 2006 ; je ne suis donc pas rentré à l’école après les vacances de Noël ! Je ne m’y attendais pas ; cela paraissait une charge énorme. Mgr Jousten a présidé l’élection et il m’a encouragé. J’ai expérimenté la vulnérabilité et la précarité de la vie monastique. Pour tenir dans ma vocation monastique et ce service comme abbesse, mon attachement au Christ est fondamental. C’est la prière qui reste l’orientation de ma vie.
A présent, l’abbaye fait partie d’une Congrégation, la Congrégation bénédictine européenne de la Résurrection, qui réunit 11 communautés de 7 pays européens. La présidente est l’ancienne abbesse de l’abbaye d’Hurtebise. Cela représente près de 179 religieuses.
Comme prévu par nos constitutions, à 70 ans, j’ai écrit à la présidente pour remettre mon mandat. Après une consultation de la communauté, elle a demandé que je prolonge ma mission jusqu’à 75 ans, mais pas seule. Le Conseil de l’abbesse est composé de quatre sœurs : deux conseillères que je choisis et deux autres sont choisies par la communauté, où nous sommes aujourd’hui 18, avec une moyenne d’âge autour de 75 ans.
Une particularité de l’abbaye est qu’il s’agit d’une communauté contemplative, mais ouverte sur la ville. Cela a-t-il toujours été le cas ?
Avec la présence de l’école dans nos murs, où de nombreuses sœurs ont accompli toute leur carrière, nous avons toujours eu un contact avec l’extérieur. D’autres engagements sont venus au fil du temps, par des rencontres ou des sollicitations. C’est le cas du dialogue interreligieux, notamment le dialogue interreligieux monastique avec le Bouddhisme, de la communication non-violente, la formation Mess’Aje, l’animation spirituelle de l’école fondamentale,…
Comment évolue la vie religieuse aujourd’hui ?
A l’hôtellerie, il y a souvent des personnes en recherche spirituelle qui passent parfois un certain dans l’abbaye. Avec certaines, nous acceptons qu’elles participent, en plus des offices, à la vie de la communauté. L’une d’entre elle a fait sa confirmation à la Pentecôte.
Le monachisme fait face à des défis, comme l’Eglise. Il doit évoluer, sans mettre en cause les piliers, mais en étant ouvert à des expériences personnelles de foi. La question de l’oblature se pose, par exemple pour des femmes mariées ou des veuves qui se découvrent une vocation à la prière. Ce sont des expériences auxquelles nous réfléchissons car la vie monastique, avec des petites communautés, est amenée à évoluer.
Les monastères ont toujours été des pôles dans la vie de l’Eglise et c’est toujours le cas aujourd’hui. Même dans la vulnérabilité, il y a un message à notre société. Les monastères restent des lieux d’accueil pour les « chercheurs de Dieu », qui sont de tous les horizons, comme nous le voyons à la messe de midi, toujours fréquentée. Cela nous invite à rester un lieu porteur de sens, dans la ville.
Auteur: François DELOOZ