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“Prions pour que les progrès technologiques contribuent à construire la paix”. Tel est le message envoyé par Mgr Delville en ce 1er janvier, lors de la Marche pour la paix organisée par la communauté liégeoise de Sant’Egidio. 

Cette marche est organisée depuis plusieurs années pour se souvenir de tous les pays en guerre dans le monde et souligner l’importance que chacun s’engage pour la paix à son niveau.

Cette année, un invité spécial a pris la parole à la fin de la Marche. Il s’agit de Frédéric Van Leeuw, procureur fédéral, qui a mené les enquêtes dans le cadre des attentats de Bruxelles ou sur le trafic de drogue sur la messagerie Sky ECC. Il a abordé la question de la réconciliation et les relations qu’il a pu établir avec les victimes.

Mgr Delville est également intervenu pour faire écho au message du pape à l’occasion de la Journée pour la paix et à l’appel qu’il lancera lors de l’Angélus, à Rome, le matin du 1er janvier. Voici l’intégralité de son message : 

Chers Amis,

C’est une joie pour moi de participer à cette marche pour la paix. Je remercie François Delooz et la Communauté S. Egidio de l’avoir préparée cette année aussi. La paix, c’est notre souhait à tous au début de cette année. C’est mon souhait à moi pour notre ville et notre province de Liège, et pour le monde entier. 

Le pape François, dans son message pour cette 57e Journée mondiale de la paix, insiste sur les défis de l’intelligence artificielle. En fait, depuis déjà longtemps, nous dit le pape: « les nouveaux outils numériques changent le visage des communications, de l’administration publique, de l’enseignement, de la consommation, des relations interpersonnelles et de la vie quotidienne » (2). Est-ce un bien ou est-ce un mal ? Le pape nous dit de faire attention : « Les remarquables progrès des nouvelles technologies de l’information, en particulier dans la sphère numérique, présentent des opportunités enthousiasmantes et des risques graves, avec de sérieuses implications pour la poursuite de la justice et de l’harmonie entre les peuples ». C’est en cela que ces technologies nouvelles touchent à la paix.

Cette année, nous avons assisté à la diffusion de l’intelligence artificielle. Celle-ci est devenue populaire par sa version conversationnelle, le ChatGPT, c’est-à-la conversation à partir du « Transformeur génératif pré-entrainé », le « generative pre-trained transformer », GPT. Il s’agit « de sciences, de théories et de techniques visant à ce que les machines reproduisent ou imitent, dans leur fonctionnement, les capacités cognitives de l’être humain ». Ce sont des machines qui apprennent par elles-mêmes. « L’intelligence artificielle va devenir de plus en plus importante (…). Elle promet, par exemple, des économies de main-d’œuvre, une production plus efficace, des transports plus faciles et des marchés plus dynamiques, ainsi qu’une révolution dans les processus de collecte, d’organisation et de vérification des données ». 

Mais ces machines peuvent aussi nous contrôler. Elles peuvent s’ingérer « dans les processus électoraux, la mise en place d’une société qui surveille et contrôle les personnes ». Elles peuvent se tromper et même halluciner. Elles peuvent être utilisées pour la guerre. On le voit maintenant avec les drones, qui peuvent tuer et détruire sans contrôle humain direct. Avec l’usage de ces techniques, « les inégalités pourraient croître de manière disproportionnée, le savoir et la richesse pourraient s’accumuler dans les mains de quelques-uns, avec de graves risques pour les sociétés démocratiques et la coexistence pacifique ».

Or, dit le pape, « tout ne peut pas être prédit, tout ne peut pas être calculé. En fin de compte, la réalité est supérieure à l’idée ». On doit garder le “sens de la limite”. « En effet, l’être humain, mortel par définition, pensant dépasser toutes les limites grâce à la technique, risque, dans l’obsession de vouloir tout contrôler, de perdre le contrôle de lui-même ; dans la recherche d’une liberté absolue, il risque de tomber dans la spirale d’une dictature technologique ». C’est la leçon que la Bible nous donne dans l’histoire de la tour de Babel, par laquelle l’homme voulait dépasser ses propres limites (Gn 11,1-9). « Reconnaître et accepter ses limites de créature, c’est pour l’homme une condition indispensable pour obtenir, ou mieux accueillir, la plénitude de Dieu comme un don ». Dieu lui-même nous a montré l’exemple, en s’incarnant dans un enfant, dans un petit, dans un être limité.

Dès lors, pour « encourager les bonnes pratiques », dit le pape : « j’exhorte la Communauté des nations à travailler ensemble afin d’adopter un traité international contraignant, qui réglemente le développement et l’utilisation de l’intelligence artificielle sous ses multiples formes ». « Il est impératif de garantir une supervision humaine adéquate, significative et cohérente des systèmes d’armes ». « Nous avons donc le devoir d’élargir notre regard et d’orienter la recherche technico-scientifique vers la paix et le bien commun, pour le service du développement intégral de l’homme et de la communauté ». « Si l’intelligence artificielle était utilisée pour promouvoir le développement humain intégral, elle pourrait introduire d’importantes innovations dans l’agriculture, dans l’éducation et dans la culture, une amélioration du niveau de vie de nations et de peuples entiers, la croissance de la fraternité humaine et de l’amitié sociale ». L’intelligence artificielle pourrait même aider à trouver des pistes de paix. 

Ce message d’espérance et de paix est très actuel. Nous prions pour que les progrès technologiques contribuent à construire la paix. 

Chers Amis, dans cet esprit, je remercie chacun de vous d’être venu aujourd’hui, quelles que soient sa religion ou sa conviction. Que cette année soit une source de paix pour vous tous et vos familles, et ajouterai-je, spécialement pour les malades que nous connaissons et que nous côtoyons. Nous plaçons nos espoirs dans l’année 2024! Car nous pouvons travailler tous à la paix en accueillant Dieu qui vient à nous! 

Bonne année à tous! 

Gutes Neues Jahr für allen !

Bonne annèye à turtot!

+ Jean-Pierre Delville, évêque de Liège