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Ce dimanche 11 février, la communauté catholique vietnamienne du diocèse s’est rassemblée pour célébrer la fête de Tet ou nouvel an sino-vietnamien. Une célébration haute en couleurs placée sous le signe du dragon. 

Photo : Les “piliers” de la communauté catholique vietnamienne de Liège en compagnie du père Jean-Marie Bui et de l’abbé Mathias Schmetz (à l’arrière-plan) et du dragon, signe de l’année 2024 (c) Sophie DELHALLE 

En amont de cette célébration, nous avons fait la rencontre de Jean-Marie Bui, actuel recteur de la communauté vietnamienne de Liège. Jean-Marie a quitté son Vietnam natal en 1979. Il faisait alors partie des ‘boat people’ qui fuyaient le régime communiste sur des bateaux de fortune. “J’avais quinze ans, j’ai été repêché par un navire français, raconte-t-il, et je me suis installé en France“. Il y restera pendant 15 ans. Le reste de sa famille le rejoindra en 1985.

Ouverture aux autres religions 

Issu d’une famille bouddhiste, le jeune informaticien demande le baptême vers l’âge de 23 ans. Quelques années plus tard, il reçoit sa vocation de prêtre et rejoint la Belgique pour entrer au Séminaire. “Ma famille a bien accepté ma conversion. Quand j’ai annoncé que je voulais devenir prêtre, ma maman n’a pas compris car la notion de vocation n’existe pas dans le bouddhisme Dieu n’appelle pas.” Rassurez-vous, Jean-Marie a gardé d’excellentes relations avec ses parents, ses frères et sœurs. Cela est dû probablement à cette ouverture naturelle aux autres religions inscrite dans la culture vietnamienne. “Dans notre culture, les mariages entre personnes de différentes religions ne posent pas problème“.

La plus ancienne et la plus petite communauté

L’année 2024 sera marquée par deux anniversaires importants pour Jean-Marie: le passage du cap de la soixantaine et le vingt-cinquième anniversaire de son ordination par Mgr Houssiau. “Je n’ai aucune racine chrétienne au Vietnam” précise notre interlocuteur. Et quand il accepte de devenir le troisième recteur de la communauté vietnamienne depuis sa création, Jean-Marie doit apprendre à connaître l’Eglise du Vietnam, ses coutumes, et aussi à célébrer en vietnamien. Cette communauté étrangère est la plus ancienne à s’être installée dans le diocèse mais aussi la plus petite et la plus vieillissante. En effet, elle ne se renouvelle pas, contrairement par exemple à la communauté italienne. “Les Vietnamiens n’ont pas de raison de venir à Liège, il n’y a pas de travail pour eux.”


Le père Jean-Marie Bui en tenue traditionnelle vietnamienne pour l’occasion (c) Sophie DELHALLE

Notre Dame de La Vang

Si les premières générations restent fidèles à leur culture et à leur foi chrétienne, les plus jeunes prennent progressivement de la distance avec leurs racines. Il y a quelques années, la communauté vietnamienne rassemblait encore 200 personne lors des grandes célébrations (Noël, Nouvel an, Pâques, Toussaint), aujourd’hui, ce chiffre est à diviser par deux et la messe dominicale mensuelle ne réunit qu’une cinquantaine de personnes plutôt âgées (pour une population estimée à plus ou moins 1000 personnes sur Liège et alentours). C’est surtout lors du pèlerinage annuel à Banneux auprès de Notre Dame de La Vang (apparue au Vietnam au milieu du 18e siècle au plus fort des persécutions par le régime royal) que les catholiques vietnamiens se retrouvent en nombre. C’est en réalité le plus grand pèlerinage national – devant les Sri Lankais et les Polonais – avec en moyenne 6000 participants venus de Belgique mais aussi d’Allemagne, des Pays-Bas, du Luxembourg, de France, … “Les catholiques ne représentent que 7% de la population au Vietnam mais sont très pratiquants et très ‘mariaux’, même les Vietnamiens non-catholiques aiment la Vierge qu’ils considèrent comme une déesse“. 

Une célébration haute en couleurs 

Lors de la messe de ce dimanche 11 février, nous avons pu découvrir comment des gestes ancestraux de la culture vietnamienne ont pu être intégrés à la liturgie. “Ce sont des rituels qui vont au-delà de la religion” estime le père Jean-Marie. Le nouvel an sino-vietnamien ou fête de Tet est une fête de réunification familiale où chaque génération rend hommage à celle qui l’a précédé. C’est pourquoi la célébration commence par l’encensement de l’autel des ancêtres. Au cours de la messe, nous avons également assisté à une procession d’offrandes par les anciens de la communauté.

Toute la célébration fut rythmée par une chorale et des chants en vietnamien, accompagnés par deux guitares et une cithare aux sonorités envoutantes. A la fin de la messe, les enfants ont reçu une enveloppe rouge – couleur symbolisant la chance – contenant des étrennes de la main de l’abbé Mathias Schmetz, ancien doyen et grand ami des vietnamiens de Liège.

Gourmandise finale 

Un nouvel an vietnamien ne serait pas complet sans les traditionnels pétards (en version électronique!) et la danse de la licorne exécutée par un dragon aux couleurs chatoyantes, pour le plus grand bonheur des petits et des grands ! Chacun a par ailleurs souhaité être pris en photo aux côtés des danseurs costumés. Après la célébration, les fidèles ont partagé des mets spécialement préparés pour l’occasion comme ce gâteau carré à base de riz, de graines de soja et de viande – cuit pendant 10 heures-  représentant la terre. Sous son aube, le père Jean-Marie Bui avait, comme beaucoup de convives, revêtu la tenue traditionnelle, tunique et turban d’un bleu lumineux … comme son sourire. 


Cette petite fille est visiblement ravie de recevoir ses étrennes dans une belle enveloppe rouge, symbole de chance. (c) Sophie DELHALLE

Texte: Sophie DELHALLE