On croyait le chapitre définitivement clos. C’était sans compter sur la pugnacité de notre évêque-historien à résoudre l’énigme du cubitus isolé, retrouvé parmi les reliques présumées de saint Lambert. L’enquête se poursuit donc avec l’ouverture d’une autre châsse, celle de Pierre et Andolet, neveux et compagnons du saint martyr.
Photo : Mgr Delville exhibe devant le parterre de journalistes le cubitus erronément identifié comme clavicule lors de l’ouverture de la châsse de saint Lambert le 16 octobre 2023. (c) Sophie DELHALLE
Tout d’abord, petit rappel des faits. En septembre 2023, Mgr Delville donnait son accord pour l’ouverture de la châsse de saint Lambert, dont la dernière visite remontait à 1985. A cette époque, seule une étude des authentiques (documents authentifiant les restes humains) et un inventaire des différents bocaux contenant les reliques avaient alors été effectués. Notre évêque, quant à lui, autorisait l’étude anthropométrique des ossements requérant leur manipulation par un médecin légiste réputé, le directeur de l’Institut médico-légal liégeois, Philippe Boxho.
L’os mystère
A la mi-octobre, devant un parterre de journalistes, quelques chanoines, le Conservateur du Trésor de Liège et ses collaborateurs, Mgr Delville avait donc retiré les scellés de la boîte rouge renfermant les reliques du saint patron de Liège, extraite quelques jours plus tôt de la monumentale châsse reliquaire, exposée à la cathédrale.
Au premier coup d’oeil, le professeur Boxho remarque la présence d’un os mal étiqueté – un cubitus et non une clavicule – et n’appartenant pas au même squelette que les 26 autres ossements déballés. Après analyse, ce reste humain aurait appartenu à un adulte de très petite taille. Or, comme nous l’apprennent les textes historiques, le compagnon de saint Lambert, Pierre, aurait été de “minora statura”, ce qui signifie de plus petite stature. D’après les calculs du légiste, saint Lambert aurait mesuré entre 1,65 et 1,75 m. Cette trouvaille met donc la puce à l’oreille du Conservateur du Trésor, Julien Maquet qui imagine aisément qu’un transfert aurait pu avoir lieu lors de l’ouverture des châsses de Lambert et de Pierre en 1489.
En effet, à la date du 18 avril 1489, Henri des Marêts, chanoine de Saint-Lambert (1478- 1515), après avoir inspecté la châsse de saint Lambert, visita celle de ses compagnons de martyr, Pierre et Andolet. Il y trouva leurs corps entiers, sauf la tête de Pierre, dont il y avait cependant une mâchoire garnie de dents. Des inscriptions identifiaient les reliques. La châsse fut refermée avec une attestation et les ossements enveloppés de soie. “Ont-ils oublié un ossement et par facilité l’ont déposé dans la châsse de saint Lambert encore ouverte?” s’interroge Julien Maquet. A ce stade, toutes les hypothèses sont permises. L’ossement isolé par Philippe Boxho sera-t-il de même couleur et aspect que ceux conservés dans la châsse de Pierre? Nous en saurons plus dans le courant du mois de mars.
Texte: Sophie Delhalle