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C’est une histoire comme on les aime : le récit du sauvetage d’une potale en mauvaise posture par un Liégeois passionné de petit patrimoine. Nous avons donc rencontré Pierre Périlleux pour en savoir plus sur son projet. 

La potale de la rue des Ecoliers (ici photographiée dans les années 1990) a aujourd’hui perdu sa Vierge et sa croix, mais Pierre Périlleux est bien décidé à lui rendre son éclat et sa splendeur d’antan. DR

Cela me désole toujours de voir le peu de cas que l’on fait du petit patrimoine” nous confie d’emblée Pierre Périlleux, représentant commercial. Il nous raconte son incroyable histoire qui a débuté en juillet 2023.
C’est en me promenant rue des Ecoliers que j’ai constaté la disparition de la potale. J’ai donc mené l’enquête pour savoir ce qu’elle était devenue.” Après avoir interrogé les passants, Pierre apprend que la maison où se trouvait la potale disparue appartient à un couple qui habite un peu plus loin, dans la même rue. Il parvient à obtenir leur numéro de téléphone, contacte les propriétaires et apprend que la potale a bien été décrochée afin de remplacer les châssis. “J’ai senti que le monsieur était méfiant, et je le comprends, puis, au fur et à mesure que je lui exposais mes intentions de restaurer et d’accrocher à nouveau la potale à ma maison, je l’ai senti rassuré.”

Un beau cadeau

En fait, cette potale d’un magnifique bleu marial a été construite par un menuisier, le papa du propriétaire en question dans les années 1950. Au fil du temps, la potale a malheureusement subi d’importantes dégradations et la statue a été donnée à une ancienne locataire décédée. Le fils n’a donc pas de projet précis pour cette niche vide et abîmée. “Le propriétaire m’avait demandé un délai de réflexion après lequel je l’ai donc recontacté. Je lui demande s’il a pris sa décision et il m’annonce que je peux récupérer la potale. Quand je lui demande son prix, il me répond : “Je vous l’offre”. Cela m’a beaucoup touché.”

Des potales en sursis

On compte sur Liège une trentaine de potales* dont une vingtaine en Outremeuse. Celle de la rue des Ecoliers faisait même partie d’un circuit, élaboré par la Ville (qui en fait peu la promotion pourrait-on regretter). Mais les potales liégeoises ne sont pas classées – sauf exception pour celle de Beauregard – et ne doivent leur entretien (et leur survie) qu’à l’attachement et à la bonne volonté de quelques habitants du quartier. On les appelle les gardien(ne)s de potale. La plupart ont déjà atteint un certain âge, et à chaque disparition, c’est l’avenir d’une potale qui est en jeu. Surtout depuis que celles-ci sont ponctuellement la cible d’actes de vandalisme. 

Respecter l’original

La potale orpheline attend aujourd’hui son relifting, bien au chaud dans l’atelier d’un menuisier. Une première pour l’artisan liégeois Eric Lomré. “Je n’ai jamais eu une telle commande mais je trouve cela intéressant.” L’opération consistera à démonter proprement l’objet pour établir un diagnostic complet et procéder au nettoyage et au renfort de certaines parties. L’objectif étant d’assurer l’étanchéité de la pièce pour éviter de nouvelles infiltrations et lui assurer une longue vie contre vents et marées. “Après en avoir discuté, nous souhaitons vraiment rester au plus près de l’original, et nous allons notamment conserver la couleur bleue” explique Pierre Périlleux.


Pierre Périlleux aimerait vraiment que sa potale soit inaugurée le 15 août prochain (c)Sophie DELHALLE

Inauguration festive 

Après cette étape importante, Pierre, manuel à ses heures perdues, nous montre comment il va installer un éclairage led à l’intérieur avec minuterie pour permettre aux passants d’admirer la potale été comme hiver. Reste la question de la nouvelle locataire qui élira domicile dans la niche. “Je ne vais pas y placer une statue habillée, mais sur les conseils du doyen Jean-Pierre-Pire, je vais probablement choisir une Vierge de Banneux“.

Cette potale trouvera alors place entre les pierres de taille de la façade du numéro 28 de la rue Fosses-aux-Raines, en face de l’église Saint-Nicolas, en Outremeuse, où Pierre effectue également des travaux. “J’ai comme projet d’y installer un grand théâtre en bois au rez-de-chaussée ainsi que toute ma collection de marionnettes à tringles.” Un musée privé qui devrait ouvrir ses portes, sur demande, en 2025. La potale devrait être inaugurée et bénie par le doyen Jean-Pierre Pire lors du cortège du 15 août. Rendez-vous est pris ! 

*Les potales seraient apparues au 14ème siècle, d’abord niches creusées dans un mur, afin d’y déposer la statue d’un saint protecteur ou de la Vierge, puis à partir des 16-17ème siècle, on leur préféra des niches en bois, accrochées aux façades. Lors des festivités du 15 août, les statues contenues dans ces potales sont habillées, fleuries et illuminées.

Texte: Sophie DELHALLE